Mamadou Sall, un jeune patron qui connecte les agriculteurs et les investisseurs en Afrique

Publié le jeudi 7 juillet 2016

Mamadou Sall a récemment créé Bayseddo, un site web destiné à aider les agriculteurs qui peinent à trouver des financements, en facilitant la rencontre entre l'offre et la demande de capitaux.

Comme dans la majorité des pays d'Afrique, les difficultés d'accès au crédit constituent un frein au développement des exploitations agricoles au Sénégal, où la majeure partie des terres arables ne sont pas encore cultivées. Mamadou Sall, un jeune entrepreneur dakarois de 27 ans, a donc décidé de prendre le problème du financement à bras-le-corps en créant une plateforme de mise en relation entre les agriculteurs africains et les investisseurs.

Né d'une mère commerçante et d'un père ayant travaillé dans les industries extractives, Mamadou Sall voit le jour à Pout, une commune de la région de Thiès située à l'est de Dakar. Tout jeune, il se voit bien intégrer un jour le corps enseignant universitaire au sein de la capitale sénégalaise. Soucieux d'aller plus loin dans ses études, malgré l'obtention en 2012 d'une maîtrise en gestion informatisée à l'université Gaston Berger de Saint-Louis - un niveau de qualification plutôt honorable, il opte pour un master 2 en sciences de gestion. Mais un évènement va radicalement modifier la trajectoire du plan de carrière qu'il envisage alors : le visionnage, en juillet 2014, du biopic « Jobs », un film qui retrace l'histoire de Steve Jobs, le cofondateur du géant américain de l'informatique Apple. Mamadou est immédiatement séduit par le portrait de cet entrepreneur américain : un innovateur visionnaire, perfectionniste et anticonformiste, capable d'inspirer les autres. Il a désormais l'intime conviction que l'entrepreneuriat est la voie professionnelle qui lui correspond le mieux. Il arrête donc ses études supérieures pour se consacrer pleinement à sa nouvelle passion. Dans un premier temps, il contribue à la mise en place de Karangue, un projet social mené en partenariat avec l'opérateur français de télécommunication Orange, destiné à prévenir la mortalité infantile et assurer le suivi médical des femmes via la téléphonie mobile. Mais c'est sans doute Bayseddo qui est à ses yeux le projet potentiellement le plus « bankable » et le plus utile à la communauté. Ce terme wolof désigne une pratique ancestrale qui consistait à rapprocher deux personnes, l'une disposant de peu de moyens et l'autre possédant des ressources matérielles, en vue d'exercer une activité agricole. En l'occurrence, il s'agit d'une plateforme qui contourne le schéma classique d'intermédiation entre prêteurs et emprunteurs : d'une part, elle donne l'occasion aux agriculteurs de déposer leur projet en ligne pour susciter l'attention des investisseurs ; d'autre part, ces mêmes investisseurs, en s'enregistrant sur le site, ont la possibilité de dénicher des projets agricoles à fort potentiel de croissance. L'incubateur CTIC Dakar, spécialisé dans les technologies de l'information et de la communication, apporte son concours au développement et à l'amélioration du site pilote, en plus des conseils prodigués en matière entrepreneuriale depuis le début de l'année 2015.

Même si la plateforme www.bayseddo.com est actuellement encore en phase expérimentale, l'engouement autour de ce nouvel outil innovant est tel que certains des investisseurs s'y étant inscrits ont déjà financé deux exploitations agricoles situées dans la région de Dakar, près du Lac rose ; l'une spécialisée dans les haricots verts et l'autre dans la culture des aubergines.

« Plusieurs promesses de financement vont être honorées dès le début l'année 2017 », assure Mamadou Sall, qui s'évertue à établir des partenariats avec d'autres financiers, car il a très vite compris que le nerf de la guerre est l'argent : plus il y aura d'investisseurs répertoriés sur la plateforme, plus Bayseddo connaîtra un trafic conséquent et plus vite le succès sera au rendez-vous.

Bien au-delà du seul Sénégal, ce jeune entrepreneur social envisage de connecter les agriculteurs et les investisseurs dans toute l'Afrique ; un continent qui, ne l'oublions pas, dispose d'un potentiel agricole suffisant pour nourrir toute la planète.

Harley Kenguéléwa

(Source : Forbes Afrique, 7 juillet 2016)



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